De Irkeshtam à Kashgar


De IRKESHTAM à Kashgar



- Au pays des Ouighours -

23 au 28 septembre 2016 Chine 1005 km

Après 3 semaines au Kirghizistan, nous passons notre première frontiere terrestre, et quelle frontière! 


Passage de la frontière Chinoise

Nous appréhendons un peu la douane chinoise. En effet, nous nous apprêtons à rentrer au Xinjiang, région Ouighour à majorité musulmane où les Chinois sont sur leurs gardes.

On a entendu que tout les bagages sont passés au peigne fin et que même les cartes mémoires des appareils photos et des ordi/tablettes sont inspectées. S’il faut passer en revue nos 3000 photos et films, ça risque de prendre du temps. Et on ne vous parle même pas de celles d’Alice et Benoît qui voyagent depuis plus d’un an…

C’est donc complètement paranos et sur nos gardes que nous attaquons cette journée : ajourd’hui, le mot d’ordre est “profil bas jusqu’à l’obtention du tampon Chinois”!

 

La frontière se passe en deux temps, tout d’abord à la frontière physique, elle même précédée de plusieurs checkpoints, puis 140 km plus loin à Ulugchat. La portion de route entre les 2 postes frontière etant interdite à la circulation des étrangers, il nous faudra prendre un taxi.

 

On se lève donc à l’aube, vers 6h00 pour être à la frontière kirghize dès l’ouverture. On y retrouve des dizaines de camions arrivés dans la nuit et qui attendent patiement de pouvoir passer. Une sacré file d’attente! Heureusement, avec nos vélos, on peut se faufiler pour les doubler et la douane kirghize est passée en à peine 10 min. Il est à peine 9h00 quand nous arrivons à la frontière Chinoise. Nos bagages sont scannés, nos passeports sont pris par un douanier qui nous informe que les 140 km entre Irkeshtam et Uluqchat étant interdite, nous devons négocier avec l’un des chauffeurs de taxi qui attendent dehors (600 yuans pour 4 et 4 velos). Nos passeports sont alors confiés au chauffeur, on ne les reverra que quelques heures plus tard. Avouons le, si nous n’avions pas été au courant avant, on aurait pas été aussi zen de laisser nos passeports comme ça.

 

La route jusque Uluqchat est très jolie. On retrouve des montagnes arides sculptées par l’eau, des fonds de vallées verdoyantes et même quelques chameaux!

Nous arrivons à Uluqchat avant 12h (heure Kirghize), mais la douane vient tout juste de fermer. Réouverture à 16h30 (heure de Pékin, soit 2h de plus)… Près de 3h à attendre coincés ici, sans un yuan en poche. On finit donc notre délicieux saucisson kirghize et le bout de fromage qu’il nous reste avant de commencer à trier quelques photos.

Les chauffeurs sont dans les starting block lorsque la douane ouvre enfin. On remplit les classiques formulaires administratifs. Honnêtement, à part nos noms, prénoms et numéro de passeport, on ne sait pas franchement ce qui y est écrit mais jusque là tout va bien.

On découvre les affiches indiquant toute la nourriture interdite d’importation… c’est qu’on en a plein les sacoches, nous.

Première frayeur lorsqu’un douanier tique serieusement sur une mystérieuse page blanche présente dans le passeport de Nico (sans doute une page test lors de l’impression du passeport, on ne s’était jamais trop posé la question!). Après de longues minutes de discussion à l’aide d’un traducteur téléphonique, le douanier semble rassuré et retrouve le sourire (et nous aussi!). Ouf, c’est bon pour Nico.

C’est ensuite au tour de Benoît d’être défiguré : de par ses quelques années de plus, ses cheveux et sa longue barbe, il est méconnaissable sur son passeport... Plusieurs douaniers se prêtent au jeu des ressemblances pendant un bon quart d’heure à se demander si c'est bien le même homme. Lui aussi à le droit à son interrogatoire mais revient finalement après quelques minutes d'angoisse pour Alice.

Nous passons tous les 4 nos bagages au scanner, et nous obtenons sans délai le précieux tampon.

Quoi, c’est tout? Vraiment?!? Vous voulez pas checker nos photos, vider nos sacoches, nous confisquer notre nourriture?!? On traîne pas alors! On file vite avant qu’ils ne changent d’avis. Et dire qu’on s’était fait une montagne de ce passage de frontière… pour rien!

Il est plus de 17h lorsque nous foulons réellement le sol Chinois, soit plus de 7h après avoir reçu le tampon kirghize…

 

Nous plantons la tente quelques kilomètres après Ulugchat. Notre première nuit en Chine est l'occasion de découvrir la curiosité des Chinois. Quelques uns s'arrêtent pour voir ce que nous faisons. Ils nous observent, touchent, inspectent, sans vraiment tenter d'échanger. Déroutant. Les rechauds, les tentes, les vélos… tout y passe. Surtout les vélos couchés qui intriguent beaucoup partout où ils passent.  Certains sont même revenus le lendemain matin avec les yuans qu’ils pensaient suffisants pour les acheter.

Le filtre à eau intrigue
Le filtre à eau intrigue

Après quelques km de montée, un faux plat descendant sur “l’autoroute” toute neuve et très peu fréquentée nous permet de rejoindre très rapidement Kashgar. La route n’est pas très intéressante et le vent dans le dos aidant, on file à plus de 35 km/h de moyenne... 80km au compteur à midi… du jamais vu!

Village Ouighour en terre
Village Ouighour en terre

Kashgar, carrefour de la route de la soie

Au carrefour de plusieurs routes de la soie, Kashgar a une position stratégique (pas étonnant que les Chinois soient prêts à tout pour conserver ce bout de terre perdu aux confins de l’Himalaya). Au sud, on rejoint le Pakistan et la plaine indienne, à l’Ouest, toute l’asie centrale et l’Iran s’ouvre à nous, au nord, la Mongolie et la Russie et enfin à l’est, le désert de taklamakan et la Chine. Kashgar est aussi une ville étape (et refuge) coincée entre le désert de taklamakan, la chaîne de l’Himalaya et les monts Tian Shan. Les commerçants en profitaient souvent pour changer de monture : ceux qui s’aventuraient dans le désert prenaient des chameaux alors que ceux qui voulaient traverser les montagnes choisissaient des yaks.

 

Malheureusement, il ne reste aujourd'hui plus grand chose de la vieille ville. Sous des prétextes d’insalubrité et de sécurité, le gouvernement chinois à entrepris la démolition de la ville vieille de plus de 2000 ans.

Les vieilles maisons en terre et les petites ruelles étriquées ont laissées place à des rues plus larges et des maisons en briques recouvertes d’un enduit en terre pour faire un peu plus ancien ou des bâtiments au style persien. Les grandes avenues sont réservées aux voitures, les trottoirs étant divisés en 2 : scooters d'un côté, piétons de l'autre. À notre grande stupéfaction, les scooters sont tous électriques. Peut être que la centrale nucléaire que l'on a pu voir toute proche de la gare y est pour quelque chose...

Malgré tout, le charme est là. Il est très agréable de se promener dans cette nouvelle vieille ville. L’ambiance est presque authentique, l’odeurs des shashliks embaument toujours les ruelles, les artisans et les petits restos ouighours ont repris leur place pour le plus grand plaisir des yeux et des papilles. On passera quatre jours à trainer dans ces ruelles, se délectant de plats aussi délicieux que variées, où le regard sur les touristes que nous sommes est souvent bienveillant. Les travers du tourisme de masse ne semblent pas encore avoir fait leurs effets par ici. Par contre la profusion de saveurs et d'épices fera son effet sur l’estomac d’Élise qui a encore du mal à s’en remettre.

On goûte les brochettes mystère sur un stand de rue
On goûte les brochettes mystère sur un stand de rue

Nos premiers contacts avec les Chinois sont parfois un peu déroutants. On comprend vite qu’il faut oublier les codes de bonne conduite occidentaux! Cracher, roter ou se racler la gorge semblent être des sports nationaux auxquels chacun s’exerce quotidiennement… par contre, attention, si vous voulez vous moucher, tous les chinois autour de vous vous regarderont avec un air de dégoût!

 

Le dimanche à Kasgar, c’est le jour des… animaux!! Bon, vous aurez compris que dans la région, on aime bien s’occuper de ses bêtes le dimanche. On les tonds, on les brosse, on leur mets leurs plus beaux atours pour les vendre au meilleur prix. Le bazar de Kashgar est beaucoup plus grand et agréable que celui de Osh. On y retrouve les vaches, les “moutons à double derrière”, les chèvres, les ânes, les chevaux mais aussi les yacks et des chameaux! A notre arrivée, on comprend très vite qu’ici, on est pas là pour le bien être des animaux (Brigitte Bardot, passe ton chemin) : les stands d’animaux dépecés, puis coupés en morceaux, et enfin sur le barbecue se succèdent… Après ça on porte un autre regard sur les pauvres moutons qui se négocient pour quelques centaines de yuans.

Bon ça ne nous empêchera pas non plus de déguster les délicieuses brochettes qui avaient déjà laissé un souvenir impérissable à Nico lors de son premier passage ici! 

Oh les belles paires de fesses!
Oh les belles paires de fesses!

Après Kashgar, le désert de Taklamakan se dresse devant nous sur plusieurs centaines de km. Pédaler dans ces conditions ne nous emballe pas trop (de toute façon, nous n’avons pas le temps de traverser toute la Chine en vélo, ça tombe bien..). Nous comptons donc prendre un train en direction de Xining puis un bus jusqu'à Yushu au nord du Sichuan. On nous a prévenu que réserver un billet de train en Chine pouvait être une galère sans nom et que personne ne parle anglais à la gare. Pour éviter de se retrouver à Pékin, nous demandons donc à l’auberge de traduire et d’écrire en Chinois notre demande. Espérons que cela suffise et qu’on ne nous posera pas de questions parce que nous ne sauront de toutes façons pas y répondre. Notre petit bout de papier nous servant également à indiquer au taxi ou nous voulons aller, nous n’avons pas de mal à rejoindre la gare.

Plusieurs fouilles corporelles et scan des effets personnels sont necessaires pour atteindre les guichets, où de longues files d’attente s’etendent… Un policier s’assure du respect des files, et il a du boulot! Dès qu’il s’écarte un tant soit peu de la file, il y a toujours quelqu’un qui se faufile pour tenter d’atteindre les guichets plus rapidement (même combat pour aller aux toilettes, il faut presque jouer des coudes pour ne pas se faire gruger)… Après trois quart d’heure d’attente, on se retrouve au guichet, et on tend notre petit papier écrit en chinois. Après un petit sourire amusé, la femme derrière le guichet nous donne les precieux sésames : 39h de train en compartiment ouvert jusqu’à Lanzhou et 3h de plus pour rejoindre Xining. Youhou!!! Benoît et Alice qui vont à Lanzhou, sont dans le même compartiment que nous. Au moins, on voyagera en bonne compagnie!

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